gen_2912.1.gif
Accueil Pourquoi ? Why ? Itinéraire Préparation Journal Album Pays Données Photo du mois ! Liens e-mail me

Journal 10 - du 15 novembre au 18 décembre 2006

Indonésie

Indonésie - 908km

Tracé rouge            = vélo

Tracé violet            = avion

Tracé bleu              = bateau

 

 

 

 

Un volcan peut en cacher un autre  

 

 

 

BALI

Bali

 

Mercredi 15 novembre 2006

 

Le projet initial était de prendre le bateau pour Sumatra. Malheureusement, mes problèmes de santé rencontrés en Malaisie m’ont ralenti d’un mois et Sumatra se trouve, à présent, en pleine saison de mousson. Aussi et surtout, j’ai fait une overdose de trafic routier en Malaisie. Alors, quand je pense à la traversée de Java qui est l’une des îles les plus densément peuplées au monde, je ne suis pas réjoui.

Pour info., Java c’est plus de 120 millions d’habitants entassés sur une aire deux fois plus petite que la Grande-Bretagne avec une concentration effrayante de mille habitants au km carré (4 fois celle de la Grande-Bretagne). 60% de la population du pays vivent à Java qui, elle, ne représente même pas 7% du territoire indonésien…

Voilà pourquoi j’ai changé de plan en prenant un sympathique raccourci : Singapour - Bali en avion. J’évite, ainsi, les pluies de Sumatra et la circulation de Java. Pas mal, non ?

 

Mon taxi vient me cueillir à l’aube devant la guesthouse. Je fais alors la connaissance de Mister Lee (encore un), chauffeur très bavard, mais fort sympathique.

Lee est une personne atypique ; 1m55 les pieds levés, une touffe de cheveux colorée en doré pour masquer les traces de sa 50e révolue, pull-over moulant noir à paillettes - style années 70 - et pantalons militaires. Il me raconte son ancienne carrière de jockey – non, je n’ai pas dit Disc Jockey – à Singapour et sa passion pour la chanson qui l’a amené à sortir un album il y a quelque temps. Et j’ai la chance de pouvoir écouter et visionner ses performances artistiques sur l’écran de la plage arrière du taxi (je vous rappelle que nous sommes à Singapour…). Dans le clip, on peut voir Mister Lee en selle sur son cheval noir lancé au galop, chantant des slows langoureux en mandarin sous son t-shirt moulant jaune citron à paillettes. Décidément, il aime les paillettes, ce Mister Lee. Le clip est si kitsch que je dois me retenir de rire pour ne pas le vexer. Même dans les années 70, il aurait fait kitsch, son clip J.

 

Me voici arrivé à Singapore International Airport ; l’aéroport le plus divertissant du monde, à ma connaissance et aux dires de beaucoup d’autres. Tout est prévu, ici, pour que le passager ne voie pas le temps passer et dépense sans compter. On y trouve un cinéma, un fitness, des chambres de repos, des douches, des restaurants et magasins ouverts 24/24 et même une piscine. Les 2/3 du revenu de l’aéroport ne proviennent pas de diverses taxes aériennes, mais du business qui l’entoure ; principalement le shopping.

 

Après seulement deux heures et demie de vol (contre 1 mois et demie à vélo…), j’arrive à Bali. Je suis soulagé de retrouver mon vélo entier et sans égratignure, car il a fait le vol tout nu, tel quel. La seule chose que j’ai faite au check-in, c’est dégonfler les pneus. Je n’ai même pas pris la peine d’enlever le rétroviseur.

 

A la sortie de l’aéroport, j’étale tous mes bagages sur le trottoir, afin de rhabiller ma jument et pouvoir ainsi remonter en selle.

 

15.11.2006 - Arrivée à Ngurah Rai airport, Bali.

 

Rapidement, une grappe de curieux se forme autour de moi (Bienvenue en Indonésie !). C’est ici que je fais la connaissance de Mirta, un très gentil Balinais, passionné de vélo. Mirta supervise un club de VTT à Bali. Il me donne un tas de tuyaux sur les routes de l’île. Avant de partir, il me remet sa carte de visite en me disant de ne pas hésiter à le contacter en cas de problème, ou besoin quelconque. C’est en lisant sa carte que j’apprends que Mirta est policier. Celle-ci, je vais la garder précieusement. On ne sait jamais.

 

15.11.2006 - En compagnie de Mirta (et d'autres...), Ngurah Rai airport, Bali.

 

J’arrive à Kuta sous un soleil puissant. Avant d’aller à la chasse au logement, je fais une halte sur l’immense et belle plage de Kuta, qui est appréciée par un grand nombre de surfeurs pour ses jolies vagues tout au long de l’année.

 

Plage de Kuta, Bali.

 

Kuta est un peu à Bali ce que Juan-les-Pins est à la côte méditerranéenne française ; il ne faut pas venir ici pour l’isolement… Les logements bon marché se comptent par centaines et la région grouille de bars, restaurants, échoppes et discothèques.

Je trouve sans peine une chambre à faible prix. Et faible est le mot. Alors qu’à Singapour, je payais 15 francs un lit dans un dortoir, je débourse ici 4 francs pour une grande chambre avec un lit King Size, salle de bain, ventilo, terrasse et petit-déjeuner compris. Qui dit mieux ? Oui, l’Indonésie est l’un des pays les moins chers d’Asie, en termes de voyage. Je devrais me refaire une petite santé financière, dans ce pays J.   

 

 

Jeudi 16 – Samedi 25 novembre 2006

 

« Et si l’on passait quelques jours ensemble à Bali ? » Il ne faut pas longtemps à Ploy et moi-même pour prendre la décision. L’Indonésie est, peut-être, le dernier pays sur mon parcours, où Ploy n’a pas besoin de visa d’entrée. Alors, profitons !

En l’attendant, je passe mon temps à flâner dans Kuta et ses environs. Lorsque j’arrive sur Jalan Legian, à la sortie de Jalan Poppies 2, je suis pris d’une certaine émotion ; le Sari Club, dans lequel j’étais allé me divertir en 2000, n’est plus qu’un grand champ cloisonné sur 1'000m2. En bordure de route sont déposées des gerbes de fleurs et contre la barrière sont accrochées des photos des victimes du terrible attentat de 2002.

 

16.11.2006 - Le Sari Club... qui n'est plus. Kuta-Legian, Bali.

 

Oui, le samedi 12 octobre 2002, deux bombes ont explosé sur la bouillonnante Jalan Legian à Kuta, oblitérant les populaires Sari Club et Paddy’s Bar. Le souffle et les gerbes de feu qui ont suivi ont aussi détruit les clubs, pubs, magasins et maison avoisinants. Proche de minuit, lors de la soirée la plus chargée de la semaine, le quartier était bondé. Plus de 200 personnes y ont trouvé la mort, pour la plupart des Australiens (88) et des Indonésiens (38). L’un des principaux conspirateurs, arrêté et condamné à 2 ans et demie de prison (beaucoup ?...), est lié au groupe islamique radical Jemaah Islamiyah. Je me remémore encore les images du procès au télé journal, où l’accusé ne montrait pas le moindre signe de remord de cette barbarie.

Un monument a été érigé sur le lieu du drame, en mémoire des victimes.

 

16.11.2006 - Monument en mémoire des victimes de l'attentat de 2002. Kuta-Legian, Bali.

 

Je reste cinq jours avec Ploy à Kuta. Pendant ce temps, on ne manque ni les bons restos, ni les mauvais, ni les bonnes affaires, ni les arnaques… et encore moins les splendides couchers de soleil sur la plage.

 

18.11.2006 - Plage de Kuta, Bali.

 

Kuta n’est pas vraiment l’endroit idéal pour se faire une sérieuse idée du peuple indonésien. Ici, vous ne faites pas 10 mètres sans être harcelé par un vendeur proposant tout et n’importe quoi, allant de la course en taxi-moto au t-shirt, en passant par la marijuana et les jeunes filles « faciles »… Et ces sangsues sont dotées d’une patience et d’une persévérance à faire pâlir une abeille autour d’une tartine de confiture. Vous pouvez passer 10 fois devant le gars en 5 minutes, en regardant droit devant vous ; à chaque fois, vous serez interceptés avec la même motivation et la même insistance, voire agressivité. Infatigables, qu’ils sont…et usants, à la longue. Je me demande, parfois, si une mémoire de poisson rouge n’est pas à l’origine d’une telle endurance, chez ces spécimens J

 

Les Indonésiens ont un tempérament plutôt extraverti et une certaine confiance en eux. Tout spécialement à Kuta, où les mâles n’hésitent pas à draguer la moindre nana. Ploy n’échappe donc pas à la règle et se fait accoster par nombre de petits coqs un peu trop sûrs de leur coup J. Cette attitude sans-gêne a, néanmoins, l’air de plaire à une certaine gent féminine. Effectivement, nous croisons plusieurs touristes blondes (pourquoi blondes ?) aux bras de ces Don Juan. J’ai récemment lu un article qui mettait Bali à la 2e place – après le Sri Lanka -  des pays où les femmes touristes blanches et asiatiques viennent se « payer » les services de jeunes hommes locaux. Avis aux Amatrices ! 

 

 

Dimanche 26 novembre 2006

 

Je ne suis pas mécontent de quitter Kuta, ce matin. J’ai hâte de rejoindre les espaces plus calmes et sauvages de Bali.

Les 15 premiers kilomètres jusqu’à la sortie de Denpassar sont bruyants et très fréquentés. Ensuite, la route devient très agréable en traversant plusieurs villages pittoresques cernés de belles terrasses de riz.

 

J’arrive à destination après seulement trois heures de pédalage. Parfait comme première mise en condition !

 

26.11.2006 - Arrivée à Ubud. Monkey Forest Rd, Bali.

 

Ubud est une charmante et relaxante petite ville située sur les pentes douces du volcan Batur. Elle est le centre du « tourisme culturel » de Bali, où les galeries d’art (sculpture, peinture, gravure, etc.) ne se comptent pas.

 

Je trouve un logement sous le toit d’une adorable famille balinaise. La propriété est d’une impressionnante beauté ; les nombreuses bâtisses sont toutes de pierre et de bois sculptés au style balinais. On se croirait dans un temple hindou.

Bien que l’Indonésie soit le pays musulman le plus peuplé au monde, l’île de Bali, elle, est à prédominance hindouiste.

 

Après deux heures de sieste, je vais luncher au Lotus Café, où la qualité du menu végétarien équivaut à la beauté du site ; les tables sont disposées le long d’un étang de fleurs de lotus, avec, sur fond d’écran, un très beau temple hindou aux sculptures balinaises.

 

26.11.2006 - Lotus Café, Ubud, Bali.

 

Je constate rapidement que le charme, ainsi que l’atmosphère calme et nonchalante de ce bourg provoque de vifs effets de dépendance, où les jours pourraient facilement devenir des semaines, et les semaines devenir des mois…

 

26.11.2006 - Lotus Café, Ubud, Bali.

 

 

Lundi 27 novembre 2006

 

Deuxième séance de remise en forme : l’ascension du volcan Batur !

Dès la sortie d’Ubud, ça grimpe… et ça ne dé-grimpera plus.

 

27.11.2006 - En direction de Penelokan, Bali.

 

La route qui mène à Penelokan (via Jati) est une ligne droite de 30km qui passe au travers de quelques belles terrasses de riz.

 

27.11.2006 - En direction de Penelokan, Bali.

 

Les échoppes d’art – principalement peinture et sculpture sur bois – se succèdent presque tout du long.

Les cinq derniers kilomètres sont furieusement raides et, bien que je sois déjà à plus de mille mètres d’altitude, je sue comme Johnny Hallyday en concert. Une cuite à faire transpirer un fennec !

 

Enfin ! Me voilà arrivé au sommet du cratère. Mon altimètre m’indique 1'350m. La vue sur le lac Batur - qui se trouve au fond du volcan - est belle, mais je m’attendais à plus grand spectacle. Il faut dire que le ciel est un peu voilé et que la luminosité n’est pas la meilleure vers midi.

 

27.11.2006 - Arrivée au sommet du cratère. Volcan Batur, Bali.

 

Ce qui vient surtout plomber l’ambiance, c’est l’agressivité des vendeurs ambulants qui m’assaillent de toutes parts. Je suis obligé de remonter sur mon biclou pour me réfugier.

La zone de Penelokan n’a aucun charme. Elle n’est qu’un mauvais piège à touristes - constitué de quelques restaurants aux prix surfaits, de sangsues vendeuses de sarongs et autres guides de montagne improvisés – dans lequel vient se jeter bon nombre de visiteurs arrivant par car en visite journalière organisée.

Les seuls quelques abris pour routards se trouvent au fond de la caldera, au bord du lac.  Pfff, je n’ai pas le courage de remonter les 4km de cette route en épingle ultra raide, demain matin. Par chance, j’ai l’adresse d’une famille dans le coin que m’a remise un Balinais amoureux de vélo croisé en chemin alors que je tirais la langue pour grimper ici.

Là, je suis aimablement accueilli par sa femme qui me montre la chambre d’hôte : une pièce exiguë qui devait être propre après sa construction, soit il y a quelques années… Deux araignées se baladent sur le lit ; je trouve des crottes de gecko sous les oreillers et les draps ; une blatte longe le mur ; une « fine » couche de poussière recouvre les catelles et une assiette de riz a été déposée sous le lit (quand ?) en guise d’offrande.

 

« Combien pour cette chambre ? »

« 80'000 (env. USD 8) ! » me répond-elle.

« Mais, votre mari m’avait annoncé 40'000 ?! »

 

Derrière son regard angélique se cache une professionnelle des juteuses affaires, de la famille des « Hello Boss ! », comme je les surnomme.

« Hello Boss ! » est le genre d’interpellation que l’on subit tous les dix mètres à Kuta. Lorsque j’entends ces deux mots, je sais de suite à qui j’ai à faire ; à une sangsue qui n’a, en général, qu’un objectif en tête : faire fondre mon porte-monnaie par une belle arnaque.

80'000 roupies pour cette réserve animalière ; c’est une fabuleuse « emphysicade »… et madame le sait. On s’accorde, donc, rapidement sur 40'000 avec un sot d’eau chaude pour ma douche et une belle assiette de fruits au petit-déjeuner. Je ne m’en sors, finalement, pas trop mal.

 

 

Mardi 28 novembre 2006

 

Aujourd’hui, j’ai décidé de gagner le village de Tirta Gangga (via Rendang), qui se trouve à 50km au sud, sur les bas coteaux du volcan Agung.

 

En roulant quelques kilomètres sur le pourtour du cratère, je suis émerveillé par les vues sur le lac Batur, grâce à un ciel dégagé et une lumière matinale.

 

28.11.2006 - Lac Batur, Bali.

 

En pleine côte bien raide, alors que je suis en train de zigzaguer pour ne pas mettre pied à terre, je suis enfourché par les gros paniers en osier d’un motocycliste qui tentait de me dépasser. Ses volumineuses nacelles se décrochent pour aller s’étaler en plein milieu de la chaussée. Quant, à moi, je suis déséquilibré, mais grâce à ma faible allure, je parviens rapidement à stopper sans chuter. Ouf ! Je n’ai plus qu’à m’excuser.

 

La quasi-totalité du parcours traverse des zones rurales, où les habitants vivent exclusivement de la culture du riz, des légumes et de l’élevage.

 

28.11.2006 - Vue sur le volcan Agung (3'142m). Bali.

 

Le tronçon qui va de Muncan à Selat sillonne des terrasses de riz surprenantes de beauté. Le panorama, avec ses couleurs surréalistes, me donne l’impression d’avoir plongé dans le décor d’un dessin animé. Magique !

 

28.11.2006 - Terrasses de riz entre Muncan et Selat. Bali.

 

Tirta Gangga est un patelin mis en valeur par son ancien palace hindou, ses piscines et les terrasses de riz qui l’entourent. Il aurait pu devenir un petit coin de paradis s’il n’avait pas été traversé par la bruyante route principale.

 

28.11.2006 - Ancien palace hindou. Tirta Gangga, Bali.

 

 

Mercredi 29 novembre 2006

 

Pour mon dernier jour de route à Bali, j’ai la chance de rouler lors du « Galungan Day » ; un festival balinais de grande importance qui a lieu environ tous les six mois. Durant plusieurs jours, les offices gouvernementaux sont fermés et les Balinais se rendent au temple pour diverses cérémonies. C’est aussi l’occasion, pour beaucoup, de partir quelques jours en vacances en amoureux, ou de se retrouver en famille.

 

Ce matin, c’est l’effervescence sur la route ; les familles, toutes vêtues de leurs costumes de cérémonie traditionnels, se rendent au temple du coin. Mes sens ne tardent pas à s’éveiller à la vue de toutes ces dames habillées de chemises en dentelle multicolores laissant transparaître leurs poitrines à peine voilées par leurs soutiens-gorge. Quel spectacle !

 

29.11.2006 - Galungan Day. Bali.

 

Il n’est pas rare de croiser une famille de quatre personnes sur un scooter. Plus la selle est longue, plus il y a de passagers.

 

29.11.2006 - Galungan Day. Bali.

 

J’arrive assez vite à Padangbai, d’où je dois prendre le bateau pour Lombok, demain matin.

 

29.11.2006 - Arrivée à Padangbai, Bali.

 

Je suis surpris par l’ambiance détendue de ce coin situé à l’écart de la route principale, sur une parfaite petite baie.

 

29.11.2006 - Baie de Padangbai, Bali.

 

Tous les ingrédients sont réunis, ici, pour que je fasse de l’ « overtime » : coquette plage de sable, snorkeling, plongée, jolis bungalows très bon marché au bord de la plage (env. USD 4, petit-déjeuner compris), circulation presque inexistante, trekking sur les collines environnantes, sangsues rabatteuses peu nombreuses et – last, but not least – nourriture à tomber par terre. Oui, dans ce mini bled, j’ai déniché un restaurant proposant une carte des plus salivantes pour mes papilles végétariennes. Qui plus est, nourriture sans agent conservateur, ni exhausteur de goût (MSG ou E621) ; de culture biologique ; légumes lavés à l’eau de source.

En voici quelques extraits :

-         jus de fruits frais à choix : carottes, pommes, gingembre, orange, betterave, ananas,…

-         bols de fruits secs : dates, figues, abricots, amandes, noix,…

-         salades variées : laitue, carottes, céleri, concombre, germes de soja,…

-         Houmous de tofu servi avec crackers de soja

-         Crème d’avocat servie avec chips de maïs

-         Tempeh Burger

-         Pâtes complètes au pesto, à l’huile d’olive, aux courgettes,…

Bon, si vraiment vous insistez pour un morceau de cadavre, vous le trouverez aussi, mais je vous promets que ça n’est pas nécessaire.

Pour couronner le tout, c’est le premier endroit où je vois que l’on propose de re-remplir ses bouteilles d’eau vides (eau Aqua de Danone) pour une misère (1'000 roupies pour 1.5 litres), ceci afin d’éviter la surproduction de PET.

Allez, ils méritent un peu de pub (surtout que le LP n’en fait pas) :

 

Topi Inn , au bout de la plage de Padangbai. Plats de USD 1 à 4. Personnel très sympa.

 

Si jamais, dites que vous venez de la part de Lionel. C’est pour la com’ J.

 

 

 

LOMBOK

Lombok

 

Jeudi 30 novembre 2006

 

Après une copieuse salade de fruits servie sur la terrasse de mon bungalow – s’il vous plaît – j’enfourche ma bécane et me rends à l’embarcadère qui n’est que 500 mètres plus loin. Bien évidemment, quelques rapaces mal intentionnés m’ont vu arrivé, dont un spécialement affamé. En règle générale, je les distingue assez facilement de par leur manière d’aborder, leur façon de parler, ou leur physionomie. Celui-ci, c’est le chat dans la baignoire ; il saute aux yeux.

Je l’entends déjà jacasser, alors que je ne suis qu’à l’autre bout du parking. Ce vautour tente de m’empêcher d’accéder aux guichets officiels et me demande de me rendre directement sur le quai d’embarquement en me disant qu’il va s’occuper de tout, qu’il va m’apporter le ticket et que celui-ci coûte 60 mille roupies. Je fais fi de ses conseils en l’outrepassant et me présente au guichet Passagers. Là, l’employé me signale que je dois me rendre au guichet Véhicules, mais je n’arrive pas à entendre où il se trouve, tant l’oiseau derrière moi piaille fort. Après sept ou huit tentatives infructueuses du pauvre fonctionnaire de m’indiquer la direction à suivre, je me retourne - l’air peut-être énervé – et demande à cette perruche de se taire. Ca marche ! Enfin, j’ai mon info ! 30 mètres plus loin, je me présente au guichet Véhicules, où l’employé me réclame la somme officielle de… 31 mille roupies, soit deux fois moins cher que chez l’Oncle Picsou…

 

30.11.2006 - Dans l'attente du ferry. Port de Padangbai, Bali.

 

A bord du ferry, un groupe de jeunes Indonésiens – toujours très curieux et bavards – vient me tenir compagnie. Il se trouve que cette équipe est reconduite chez elle (Lombok) gratuitement dans un bus affrété par le gouvernement. Pour quelle raison ? Eh bien, ces messieurs sont tous des immigrants illégaux arrêtés en Malaisie et reconduits à la frontière. Ensuite, c’est le gouvernement indonésien qui les a pris en charge en les ramenant chez eux (sans frais). L’un d’eux me fait comprendre, avec ses quelques mots d’anglais (et mes maigres notions d’indonésien), que la situation économique est très mauvaise en Indonésie. Quantité de jeunes musulmans désespèrent de trouver du travail et s’enfuient tenter leur chance auprès de leur grande et riche sœur, la Malaisie, qui elle, de son côté, souffre de cette invasion de clandestins chaque année plus nombreux, à tel point qu’elle vient de renforcer ses mesures de refoulement.

 

Après quatre heures sur les flots silencieux de l’Océan indien, le navire attache enfin les amarres sur l’île de Lombok. Dès la sortie du bateau, je suis accueilli par la prière du muezzin au travers de puissants haut-parleurs. Bienvenue en Terre musulmane !

 

Il reste encore 22km de route avant d’arriver à Mataram. Tout au long du parcours, des dizaines d’écoliers me hurlent « Hello Mister ! » dans les oreilles. J’en ai mal aux feuilles et au bras gauche à force de saluer et d’échanger des « High Five ».

Certains mâles sortent brutalement de leur léthargie pour me transmettre aussi leurs chaleureuses salutations.

 

J’arrive aisément au bout des 22km, aidé par une chaussée étonnamment plate. Cela change de Bali, où je n’ai pas connu 1km d’asphalte à niveau.

 

 

Vendredi 1er décembre 2006

 

La circulation est déjà au rendez-vous lorsque je quitte Mataram à 6h30, ce matin.

J’attaque sans tarder une douce grimpette (300 mètres de dénivelé sur 20km) qui va me mener jusqu’au pied du volcan Rinjani ; 2e plus haute montagne d’Indonésie culminant à 3'726 mètres.

Le centre de Lombok est une région rurale aux activités agricoles très développées.

 

01.12.2006 - Récolte du riz. Lombok.

 

Dans cette campagne, je croise presque plus de chevaux attelés que de voitures. J’ai soudainement l’impression d’être remonté dans le temps.

 

01.12.2006 - Les "cidomo" de Lombok.

 

Je ne m’attendais pas à avoir autant de supporters, par ici ; mon passage est salué par hommes, femmes et enfants avec des exclamations qui feraient mal aux oreilles d’un sourd. La plupart du temps, j’ai droit à la classique « Hello Mister ! », mais quelques jeunes créatifs me sortent des variantes du style « Hello Jack ! », ou « Hello Cowboy ! ».

Alors que j’attaque la descente en direction de la côte Est, je suis salué par un jeune boy à moto avec certaines intentions. Cet homo, au débardeur bien moulant, me fait la cour sur plusieurs kilomètres… avant de rentrer bredouille J.

 

J’arrive dans le village de Labuhan Lombok après quelque 4 heures et demie de route. Il est midi est le muezzin m’enchante à nouveau de ses louanges, du haut de son minaret.

 

01.12.2006 - Arrivée à Labuhan Lombok.

 

Je trouve une losmen (pension) non loin du centre avec des chambres délabrées, mais pour 15 mille roupies (USD 1.5) la nuit, on ne va pas se plaindre.

 

01.12.2006 - Ma salle de bain. Labuhan Lombok.

 

 

 

SUMBAWA

Sumbawa

 

Samedi 2 décembre 2006

 

Ma nuit fut un supplice dans cette chambre sans aération, ni ventilateur. Forcé de m’enfermer à cause des moustiques qui faisaient la queue devant la porte, j’ai souffert d’une chaleur intense sur ce plumard (32-35 degrés). Mon corps a dégouliné non stop et j’ai bien eu du mal à m’endormir. Je n’ai dû somnoler que 2-3 heures, pas plus.

Pour ne rien arranger, le village est privé d’électricité depuis hier après-midi et c’est à la lueur de la chandelle que je dois m’habiller et préparer mes affaires, ce matin. Je distingue une blatte cachée dans ma chaussure, une autre sous le pare-boue avant et 4-5 copines qui se baladent entre la chambre et les toilettes.

 

Je me mets en selle à 5h30 et me dirige vers le port qui se trouve 3km plus loin.

 

02.12.2006 - Le soleil illumine le sommet du volcan Rinjani (3'726m). Lombok.

 

Lombok est une petite île de seulement 80km de large. Après l’avoir traversée d’ouest en est hier matin, je dois, une fois de plus, prendre le bateau pour rejoindre l’île de Sumbawa, cette fois.

Sur la digue, je suis accueilli par une dizaine d’enfants de la rue qui vivotent ici de quelques petits boulots, tels que cirage de chaussures, ou nettoyage de vitres. Inutile de dire que je ne suis pas le client idéal. En attendant mon ferry, je m’assieds à leurs côtés et sympathise grâce à mes quelques phrases d’indonésien.

 

02.12.2006 - Avec les enfants de la rue. Labuhan Lombok.

 

Après deux heures de traversée, j’arrive au port de Poto Tano, sur l’île de Sumbawa.

 

02.12.2006 - Arrivée sur l'île de Sumbawa.

 

C’est étonnant comme le climat et l’environnement peuvent varier d’une île à l’autre ; alors que Bali et Lombok sont verdoyantes, Sumbawa est, quant à elle, très aride. Elle me fait un peu penser à l’île volcanique grecque de Santorin.

 

Je suis content de voir que la route est très peu fréquentée.

 

02.12.2006 - Deux gaillards tentent de tenir mon allure. Sumbawa.

 

Je suis moins content de constater que la chaleur est écrasante… Je n’avais plus connu telle canicule depuis le Cambodge.

 

C’est d’abord avec le sourire que je réponds aux autochtones qui me hurlent (le mot est approprié) « Hello Mister ! Où vas-tu ? D’où viens-tu ?» dans les esgourdes tous les 50 mètres, mais plus les kilomètres défilent, plus je suis fatigué et moins j’ai la force, le courage et l’envie de réagir. Après 40-50 kilomètres, ces centaines d’interpellations deviennent usantes pour le cycliste que je suis. J’en arrive, malheureusement, à me cacher sous mon chapeau pour éviter de croiser les regards.

 

Cela fait trois heures que je pédale en plein cagnard. Il est midi est le soleil est au zénith. Mon corps parvient difficilement à réguler sa température. Je suis en train de faire un début d’hyperthermie. Il me faut d’urgence trouver un endroit à l’abri du soleil pour me reposer et me rafraîchir. A l’entrée d’un village, je descends de mon vélo et vais de suite m’allonger dans une cabane, sans prendre le temps d’en demander l’autorisation à ses habitants, qui sont bien aimables de m’accueillir. Même à l’ombre, il fait une chaleur difficilement soutenable. Dans cette région reculée, l’électricité, l’eau courante et la glace n’existent pas. Je dois donc me contenter d’une boisson fruitée chaude. J’avale aussi quelques cacahuètes en attendant gentiment que ça aille mieux. Il me faut patienter 45 minutes avant de refaire surface.

 

02.12.2006 - Ma famille d'accueil lors de ma halte forcée. Sumbawa.

 

Je ne peux pas trop m’attarder, car je ne suis qu’à mi-parcours et il me reste encore 4 heures de route. Je quitte mes hôtes avec le sourire, cette fois, et repars de plus belle.

 

J’arrive vers 16h dans la ville de Sumbawa Besar, en tirant la langue.

 

Demain, c’est repos !

 

 

Dimanche 3 – Lundi 4 décembre 2006

 

Deux jours de repos à Sumbawa Besar pour me remettre de cette torride étape.

 

J’en profite pour faire une petite balade en ville et visiter Dalam Loka ; l’ancien palace du sultan, qui date de 1885. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne casse pas des briques. Quelques poutres et un toit en tôle ; c’est à peu près tout ce qu’il reste de l’époque des sultans.

 

03.12.2006 - Dalam Loka, Sumbawa Besar. Sumbawa.

 

Il n’y a pas grand-chose d’autre à faire dans cette ville. En me promenant, je tombe sur un atelier de vélos. Voilà qui m’intéresse !

 

03.12.2006 - Atelier de vélo. Sumbawa Besar. Sumbawa.

 

Sukito, le patron, m’invite à boire un verre d’eau dans son atelier. Il me montre fièrement une superbe pièce de collection : un vélo nippon avec son magnifique cadre en bois, datant de 1942.

 

03.12.2006 - Superbe cadre en bois. Sumbawa Besar, Sumbawa.

 

Il a été amené par les Japonais lors de leur invasion de l’Indonésie, durant la Seconde Guerre mondiale. « Il a déjà été vendu à un Américain pour USD 1'500. » me dit Sukito en souriant...

 

 

Mardi 5 décembre 2006

 

Je quitte Sumbawa Besar à 6h du matin et le soleil cogne déjà.

Je traverse un territoire semi désertique, où les lits des rivières sont tous asséchés et où les paysans attendent impatiemment que le ciel leur tombe sur la tête.

La route est en très bon état sur les 30 premiers kilomètres, jusqu’à Lape. Ce n’est pas le cas des 30 suivants qui mènent à Plampang, où l’asphalte est en période de mue ; la route est défoncée et j’ai mal pour mon vélo.

 

Je fais une petite halte en pleine cambrousse pour remplir mes bouteilles d’eau. A peine ai-je le temps de descendre de ma bécane, qu’un attroupement se forme autour de moi. Normal, à Sumbawa. Cette équipe est toute excitée à l’idée de prendre quelques photos. Alors, allons-y !

 

05.12.2006 - En direction d'Empang. Sumbawa.

 

A la sortie de Plampang, mon 1’331e salut de la matinée - répondant à la population locale toujours très expressive - me fait faire un écart (comme souvent) et m’amène au milieu de la route, où je me trouve nez à nez avec une camionnette arrivant en sens inverse… sous les grands rires du public. La fourgonnette, arrivant à faible allure, n’a aucun mal à ralentir et moi-même, pédalant doucement, je parviens aisément à me rabattre. Je continue donc tranquillement mon petit bonhomme de chemin, quand, 100 mètres plus loin, la fameuse camionnette me fait une queue de poisson et vient s’immobiliser quelques mètres devant moi. Le conducteur sort sa tête et ses moustaches par la fenêtre et baragouine quelque chose (quoi ?). Aussi, je m’arrête, à sa hauteur après lui avoir lancé un « Bonjour ! » poli à souhait et attend de savoir ce qu’il souhaite tant me dire. Je ne comprends rien aux quelques menues phrases qu’il articule, mais son attitude m’indique qu’il tente de m’extorquer de l’argent. Je ne traîne donc pas. Je fais mine de ne pas comprendre, m’excuse poliment en indonésien et continue ma route. Je l’entends, derrière moi, crier dans son véhicule. Aie ! Je crois bien que je suis tombé sur un type pas net du tout et empli de bien mauvaises intentions.

Ca ne manque pas ; cent mètres plus loin, il me re-dépasse, stoppe son fourgon au milieu de la route, sort à nouveau sa caboche et ses bacantes par la fenêtre… sans sortir du véhicule… et attend que je m’arrête à sa hauteur. Mon instinct me dit de ne pas m’arrêter. Je passe ainsi devant lui sans mettre pied à terre en réitérant poliment mes excuses et continue ma route en faisant comme si de rien n’était. Mon comportement le met dans une colère noire. Je l’entends hurler, cette fois-ci, comme si je venais d’assassiner ses enfants.

Là, je ne me sens plus du tout en sécurité et crains pour ma pomme, mais je continue ma route. Surtout ne pas se retourner. Il me reste encore 20km à parcourir et 20km , à vélo, c’est loin, très loin – largement assez loin pour me préparer un mauvais coup. A vélo, je suis une proie facile ; très aisément repérable et rattrapable.

Les kilomètres défilent et la camionnette n’arrive pas. Chaque bruit de véhicule arrivant derrière moi m’inquiète. J’appuie tant que possible sur l’accélérateur ; je suis pressé d’arriver à Empang.

Enfin ! Me voilà arrivé au village ! Lyophilisé, mais sain et sauf. Je me mets rapidement à la recherche d’une guesthouse pour me mettre à l’abri. Je trouve refuge dans un bungalow pourri, sans électricité. Je me douche au mandi (réservoir d’eau + bidon) et vais casser la croûte. Je meurs de faim. Alors, que je suis en pleine mastication de mon riz sauté (pour changer…) un étranger rentre dans le restaurant et s’assied à côté de moi. Courant, en Indonésie, vous allez me dire. Oui, mais celui-là, non plus, n’est pas tout net et le patron du resto me le confirme discrètement : « Attention à cet énergumène malsain ! » me fait-il comprendre. Je l’ignore, donc, en lisant un bouquin et après 15-20 minutes, monsieur s’en va voir ailleurs. Bon, je crois que je ne vais pas traîner ici non plus. J’écrirai mon journal dans ma chambre.

 

Ces événements me font prendre conscience qu’une personne un poil dérangée pourrait subitement virer et devenir dangereuse. Pas toujours très rassurant, tout ça…

 

 

Mercredi 6 décembre 2006

 

La carte indique une Scenic Area à mi-parcours. Je m’attends donc à de la belle bosse aujourd’hui.

 

Je souffre de la chaleur dès les premières heures du soleil.

 

06.12.2006 - La cuite ! En direction de Dompu. Sumbawa.

 

J’arrive à mi-chemin (50km) déjà bien lessivé après d’innombrables dénivellations. Mais, le plus dur reste à faire : la Scenic Area ; une bosse de 400m dominant la Mer de Flores, à grimper sur 4km par une route démolie. Je peine à modérer la température de mon organisme, tant il fait chaud (43-45 degrés). Une tiaffe à faire transpirer un Bédouin ! J’arrive exténué au sommet et me repose quelques minutes à l’ombre en profitant de la superbe vue sur le golfe.

 

06.12.2006 - La Scenic Area, en direction de Dompu. Sumbawa.

 

Malheureusement, même là-haut, le vent se cache et l’ombre ne suffit pas à me rafraîchir. Seule solution pour avoir du vent : attaquer la descente à belle allure.

Sur la route, je croise moult colonies de macaques quelque peu effrayés de voir passer cet objet roulant non identifié.

 

Après près de 6 heures de route, le moteur, qui est en surchauffe, réclame une pause. Je m’arrête devant une hutte proposant quelques boissons chaudes et vais de suite me mettre à l’ombre sous l’avant-toit. Il était temps de faire une halte ; mon corps ne parvient presque plus à lutter contre cette chaleur ; j’ai de la peine à trouver mon équilibre et répondre à chacune des questions de la troupe me demande un effort démesuré. Je m’allonge une demi-heure sur leur paillasse, après avoir avalé quelques cacahuètes, tomates et boissons sucrées. Je retrouve peu à peu mes esprits grâce à ces quelques glucides et sels minéraux dont j’avais besoin.

Et c’est reparti ! Il reste encore 30km de montagne avant d’arriver à Dompu et il fait encore plus chaud, le soleil étant au zénith.

L’heure de la fin des cours est maintenant arrivée et les écoliers sont des centaines à me saluer, de village en village. Une vraie haie d’honneur à faire pâlir le Prince Charles ! Pour celui qui rêve d’être une star et qui a été refusé à la Star Ac’ et à la Nouvelle Star : qu’il aille faire un saut à Sumbawa. Il sera comblé. Il se rendra compte, aussi, que ça n’est pas toujours de tout repos que d’être en permanence LE centre d’attention.

 

14h. Me voici enfin arrivé à Dompu, après avoir passé huit heures sous une boule de feu. La plante de mes pieds est collée aux sandales.

Je trouve une chambre dans la pension Samada, où je suis très amicalement accueilli. Le personnel est adorable et aux petits soins.

 

Le soir, je suis invité à dîner par Hereta ; un Sino-indonésien de Jakarta, en voyage d’affaires, qui est aussi client de la pension. Il me fait, ainsi, découvrir le marché de nuit qui est très animé en ce début de soirée.

 

20h30 : Extinction des feux, clôture des paupières et…..zzzzzzzzzz.

 

 

Jeudi 7 décembre 2006

 

8h30 : Mes paupières se décollent gentiment.

 

Ces douze heures de sommeil n’étaient pas de trop. Aujourd’hui, ma bécane a pris congé… et moi aussi !

 

 

Vendredi 8 décembre 2006

 

En route pour Bima !

Ca côte sur une dizaine de kilomètres (pour passer de 100 à 300 mètres) dès la sortie de Dompu.

 

08.12.2006 - En direction de Bima. Sumbawa.

 

Les 30 premières bornes jusqu’à Sila traversent une région sauvage et montagneuse. Le décor est grandiose ; le plus beau que j’aie traversé sur Sumbawa.

Je passe de village en village, où je suis à chaque fois accueilli tel Bernard Hinault au Tour de France. On accourt pour me voir passer. Je m’arrête un moment dans un de ces petits bleds pour acheter de l’eau et échanger quelques mots avec la population toujours souriante et accueillante.

 

08.12.2006 - En direction de Bima. Sumbawa.

 

A la sortie de Sila, je rejoins la mer et la route est plate jusqu’à Bima, en contournant des marais salants.

 

08.12.2006 - Marais salants en direction de Bima. Sumbawa.

 

Pour la première fois à Sumbawa, je termine une étape sans être démoli.

Oui, les bosses sont reines au pays des volcans.

 

Depuis l’île de Lombok, les coupures d’électricité sont quotidiennes. Elles surviennent, bien évidemment, le soir et peuvent durer d’une heure à quinze heures de temps.

En ce début de soirée, je suis donc à la lueur de la chandelle dans un Warung (petit restaurant) en train d’ingérer un plat de nouilles et légumes sautés, quand un zigoto se pointe et vient s’asseoir à ma table. Un quart de seconde me suffit pour comprendre à qui j’ai à faire ; à un mafieux malintentionné. Elles commencent à me lessiver le cerveau ces sangsues locales. Il tente de la jouer copain-copain, mais tout ça sonne très faux.

 

« Un tour organisé sur Komodo, ça t’intéresse ? »

« Non, merci. »

« Un transport pour demain ? »

« Non merci, je me déplace à vélo. »

 

Il passe alors à une vitesse supérieure :

 

« Tu ne veux pas aller faire un tour sur la plage ? C’est très joli, tu verras. Tu n’as rien à craindre. »

« Non, merci. »

Par cette proposition, ce gars vient de passer – à mes yeux - du stade de rabatteur malhonnête à celui de dangereux criminel, en étant prêt à user de la force (et celle d’autres ?...) pour me voler mes biens après m’avoir jeté dans un guet-apens.

Je précise que la ville est dans l’obscurité la plus totale… Il insiste encore 2-3 fois pour m’emmener dans ce coin tranquille…

 

Ce bonhomme n’est, en plus, visiblement pas dans son état normal. Il doit être sous l’emprise d’une quelconque drogue amphétaminique ; ses membres ne tiennent pas en place et son sourire forcé masque difficilement sa grande nervosité.

Constatant que toutes ses tentatives se révèlent infructueuses, il cherche encore à m’intimider en me mettant en garde face aux fanatiques musulmans qui sont nombreux dans cette ville. Il aura tout essayé, celui-là ! Je fais mine de l’ignorer et plonge ma tête dans un livre, en espérant que ce tordu s’en aille, car je ne souhaite pas qu’il sache dans quel hôtel je loge. Rien à faire ! 40 minutes plus tard, il est toujours scotché à sa chaise, en face de moi, lancé dans un inquiétant monologue.

J’en ai assez et décide de mettre les voiles. Il se lève aussi rapidement, me dit « A demain matin ! » et disparaît ainsi dans la pénombre. Ouf ! Il était temps ! Je ne traîne pas à rejoindre ma chambre qui, elle aussi, est bien obscure… mais personne ne me suit J.

 

 

Samedi 9 décembre 2006

 

Ma dernière étape sur Sumbawa se fait en pleine montagne. La route grimpe peu après avoir quitté Bima pour s’élever à 500 mètres. Le tracé navigue, ensuite, entre 400 et 500 mètres sur une 30e de kilomètres, traversant de nombreux villages où les habitants ne rencontrent pratiquement jamais de touristes. Certains enfants me courent après et d’autres me suivent à vélo, ou à moto.

 

09.12.2006 - Un compagnon de route. Direction Sape. Sumbawa.

 

L’écrasante majorité de ces indigènes est d’une extrême gentillesse. Il arrive, toutefois, que certains – adolescents en particulier – ne voient pas d’un bon œil mon arrivée. Leurs dérèglements hormonaux les rendent un brin agressifs et provocateurs. Aussi ai-je essuyé sur cette île : un bras d’honneur, un « Fuck You ! », ainsi qu’un caillou lancé sur mon vélo. Rien de bien méchant… jusqu’à présent J.

 

A Sape, je trouve un lit au Losmen Friendship, où je suis gracieusement accueilli par une jeune et jolie Maman sur le point de prendre sa douche J.

 

Je passe l’après-midi à rédiger mon journal sur le lit. Avant, je faisais ce travail confortablement et tranquillement assis à la table d’un restaurant. Mais, en Indonésie, j’ai dû changer mes habitudes ; ma chambre étant le seul endroit où l’on ne vient pas me déranger (jusqu’à présent…).

 

En une semaine à Sumbawa, je n’ai pas croisé l’ombre d’un touriste Blanc ; ni sur la route, ni en ville. Plusieurs locaux m’ont dit qu’ils n’avaient presque plus vu d’étrangers depuis deux ans, sur Sumbawa.

Les affaires tournent plutôt mal dans cette pauvre Indonésie qui souffre de tous les maux : Tsunamis, éruptions volcaniques, tremblements de terre, inondations, sécheresse, corruption (3e rang mondial), instabilité politique, crises économiques, … et attentats à la bombe.

La plupart des agences touristiques de Sumbawa ont fermé leurs portes, tout comme beaucoup d’autres magasins et il n’y a plus un seul centre Internet sur l’île.

 

L’Indonésie – plus grand archipel du monde – est un pays pauvre et la région dans laquelle je me trouve (Nusa Tenggara) est la plus pauvre et la moins développée d’Indonésie, avec une espérance de vie d’à peine 55 ans et un revenu annuel par habitant de 350 dollars. Je me sens bien loin de la Suisse…

 

 

 

FLORES

Flores

 

Dimanche 10 décembre 2006

 

J’arrive au port de Sape à 7h. Le temps de payer mon billet et hop ! Je monte à bord du ferry sur ma monture.

Là, j’observe que de nombreux bonshommes contournent le contrôle des tickets en passant par des accès plutôt excentriques, tels que des bateaux voisins, ou de petites barques à rames depuis la mer. Quand, à 9h, le bateau lève l’ancre, la chasse aux resquilleurs est lancée par le personnel à bord. C’est le jeu du chat et de la souris ; j’en vois certains courir se cacher dans les toilettes et sur des camions, alors que l’équipage, pas assez nombreux, tente ce qu’il peut en jetant quelques coups d’œil sous les véhicules et dans la salle des machines. Il semble que les souris aient gagné la partie, aujourd’hui ; je les vois discrètement sortir de leurs cachettes.

 

Durant les huit heures de traversée, nombreux sont les passagers qui viennent s’intéresser à ce drôle de Blanc chauve solitaire. Je fais, entre autres, la connaissance de Vitto, un jeune chrétien branché de 24 ans travaillant à Bali et venant passer les fêtes de Noël auprès de sa famille à Flores. Vitto a la tchatche. Il me raconte longuement son coup de cœur pour une Hollandaise de 36 ans rencontrée à Bali qui ne lui donne plus beaucoup de nouvelles depuis quelque temps. Vitto désespère de pouvoir se marier à une Blanche et de quitter son pays pour une vie plus stable et prospère.

 

J’arrive sur l’île de Flores en fin d’après-midi.

Labuanbajo est un charmant petit village de pêcheurs, où l’ambiance y est des plus décontractées. Mon bungalow a les pieds dans l’eau et donne plein Ouest sur la baie.

Oui, ce soir, j’ai droit à un coucher de soleil de première classe, les jambes en à l’air et la chemise ouverte. Au fait, est-ce qu’il fait froid en Suisse ?

 

10.12.2006 - Coucher de soleil depuis mon bungalow. Labuanbajo, Flores.

 

 

Lundi 11 décembre 2006

 

On m’a signalé qu’un centre Internet existait à Labuanbajo. C’est la raison pour laquelle je reste ici une nuit supplémentaire. Mais, une fois sur place, je suis bien déçu de voir que l’usage du Net est impossible dans cette hutte ; la connexion par satellite est beaucoup trop mauvaise et le débit dramatiquement lent. Il me faut une demie heure pour ouvrir une page Google… J’abandonne. Ils devraient aussi abandonner cette connexion…complètement inutile.

 

De retour à la guesthouse, je constate qu’une nouvelle locataire locale vient d’emménager dans la chambre d’à côté. Quand elle me voit arriver, elle jargouine quelques mots avec le jeune qui nettoie les chambres. Le boy, un peu gêné, me fait ensuite comprendre que si j’ai des envies avec mademoiselle, c’est tout à fait envisageable, moyennant la modique somme de 500 mille roupies (USD 50). Oui, vous l’avez compris, cette jeune biche est venue ici pour travailler. Je lui fais gentiment comprendre que je ne suis pas intéressé et la voici, tout à coup, beaucoup moins souriante.

Les parois du bungalow étant aussi épaisses que du carton, je crains un peu pour ma nuit…

 

Ce soir, je suis au lit en même temps que les poules, car une rude journée s’annonce demain.

 

 

Mardi 12 décembre 2006

 

Je n’aurais pas eu besoin de mettre mon réveil à 4h30, ce matin, car je suis réveillé à 4h déjà, non pas par le muezzin, mais par des coups de reins puissamment assénés dans la chambre d’à côté qui font cogner leur lit contre la fine cloison.

4h15 : j’entends des gémissements.

4h17 : plus un bruit…

Ah ! Je peux somnoler encore 10 minutes.

 

Je me mets en selle à 5h30.

 

12.12.2006 - Ecoliers rencontrés sur la route. Sortie de Labuanbajo. Flores.

 

Le guide LP annonce Flores comme étant une île extrêmement pentue. Je confirme.

Dès la sortie de Labuanbajo, ça commence à côter. La route est un long méandre terriblement escarpé. Tant et si bien que je suis contraint de tirer des bords, sinon je ne monte pas.

J’arrive défait au sommet de la grosse bosse qui culmine à mille mètres… et je n’ai fait que 20km. Il m’en reste encore 40.

A la descente, une bonne partie de la chaussée est défoncée et je me concentre pour ne pas finir ma course dans un nid (de poule). La pente est si raide et tourmentée qu’il me faut faire plusieurs arrêts, afin de laisser refroidir les jantes qui brûlent les patins de freins.

 

Je me disais que Flores était beaucoup plus calme que sa voisine Sumbawa, jusqu’au moment où, en pleine côte, à la remontée d’un passage de rivière isolé, une centaine de garçons d’entre huit et dix ans, arrivant de tous bords, me foncent dessus. En une minute, je suis envahi par une nuée de gosses complètement hystériques ; ils s’agrippent aux sacoches, à mes bras, au guidon, … si bien que je suis obligé de pousser une bouellée pour les ressaisir. Ca fonctionne une minute.

Deux minutes plus tard : même folie. Tour à tour, ils tentent de me piquer les biscuits accrochés aux sacoches avant. Je suis forcé de crier pour qu’ils se « calment ».

Je précise que je suis en pleine ascension, qu’il fait une cuite du diable et que je progresse moins vite qu’un homme au pas.

Tantôt ils poussent mon vélo, tantôt ils le retiennent et je manque de chuter plus d’une fois. Ces quinze minutes de côte sont les plus longues que je n’ai jamais faites.

Enfin, me revoici sur le plat ! Je pousse, là, un grand coup d’accélérateur et parviens de justesse à les semer.

 

Après quelque 10km de plat, la route redescend, redescend, redescend, jusqu’à une deuxième rivière.

Qu’aperçois-je, au loin, dès la traversée du pont ?

Une foule de bambins qui m’ont déjà bien repérés. Aie !

En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, je suis, à nouveau, envahi par une cohue de gamines, cette fois. Elles sont tout autant excitées que les garçons, mais heureusement moins culottées et plus timides et me laissent avancer lentement, sans me toucher. Comme les garçons, elles ont toutes un bidon à la main. J’en déduis que la mission des enfants, dès la sortie de l’école, est d’aller chercher de l’eau à la rivière.

Ces fillettes ne me lâchent pas d’une semelle jusqu’au sommet, où je m’arrête pour reprendre mes forces. Je suis exténué ; je n’ai pas pu dégager un seul sourire durant toute la grimpette. Quand je m’assois par terre, dégoulinant, la tête dans les mains, elles réalisent peu à peu que je suis très fatigué.

Après avoir repris mes esprits, je balbutie deux trois mots en indonésien en esquissant quelques brefs sourires. Les bambines, elles, sont toutes agglutinées à 2-3 mètres de moi et me dévisagent comme si j’étais un extra-terrestre. A l’évidence, ces jeunes écolières n’ont pas souvent vu des visages pâles de si près.

Je leur dis finalement adieu et reprends la route à la vitesse d’un escargot.

 

J’arrive, enfin, aux abords de Lembor après six heures de selle et « que » 60km. Ca vous donne une idée du relief.

 

Dans une rizière, quatre gamins, tous armés de bâtons, m’ont repéré et courent à ma rencontre. L’un d’eux porte un seau à la main. Arrivé à ma hauteur, celui-ci me montre leur cueillette qui remplit la moitié du bidon : des rats morts, qui ont été chassés à coups de bâtons dans les rizières. Non merci, les enfants ! Je vais m’en tenir au riz…

 

Je trouve sans problème la pension qu’abrite ce minuscule bled paumé.

En délestant mon vélo de ses lourds bagages, je trouve des cailloux planqués sous mon gros sac. Encore un tour de ces charognes de gamins !

 

Plus tard, je vais manger au Warung du coin et tente, ensuite, de mettre à jour mon journal… sans succès. Rien à faire ! Dans ce pays, il est impossible de rester seul à une table. Je n’ai pas écrit trois lignes que débarque l’officier de police du coin. Il n’a, visiblement, pas grand-chose à faire cet après-midi. Ce cher Agung – c’est son nom – très sympathique Balinais, 33 ans, marié, père de trois enfants, depuis onze ans sur l’île, adore la moto, s’intéresse au football, n’aime pas les mangues vertes, … ne me lâche pas la grappe. Il me prend même en photo. Alors, je fais de même J.

 

12.12.2006 - Mr Agung, policier à Lembor. Flores.

 

Après une heure d’agréable discussion, je lui demande de remonter sur sa moto et d’aller patrouiller un peu, car j’ai beaucoup de travail.

Ai-je osé lui dire ça ? Non, pas cette fois J. Je lui dis que je suis fatigué et que je vais aller me coucher un moment.

 

Me voici dans ma chambre ! Ah ? On toque à la porte… Non, je farce. On me laisse tranquille, ici J.

 

 

Mercredi 13 décembre 2006

 

L’étape d’hier fut très éprouvante, mais elle ne fut qu’un hors-d’œuvre par rapport à ce que je vais endurer aujourd’hui.

 

Le turbulent passé volcanique de Flores a laissé un relief compliqué de vallées en forme de V et de crêtes tranchantes comme des lames de couteaux, ainsi qu’une collection de volcans actifs et éteints. Il n’y a pas moins de 14 volcans actifs sur cette petite île qui, en plus, fait partie des zones les plus géologiquement instables du monde. Des tremblements de terre frappent chaque année. En décembre 1992, un violent tremblement de terre (6.8) et le massif tsunami qui a suivi tua environ trois mille personnes à l’est de l’île en aplatissant la ville de Maumere.

Le terrain accidenté rend la construction de routes très difficile ; bien que Flores ne soit longue que de 375km, sa route principale qui va d’est en ouest, serpente, se tortille, monte et descend sur près de 700km. C’est presque du 2 pour 1 !

 

Dès le départ, la route ne cesse de grimper jusqu’à 1'300 mètres (départ à 200 mètres). Ensuite, je vais subir une interminable série de descentes vertigineuses et d’ascensions à la « Cliffhanger », en naviguant entre 800 et 1'300 mètres. Je passe plus de temps en danseuse qu’assis, sur cette étroite route de montagne où la ligne droite et le plat n’existent pour ainsi dire pas. Je souffre tellement dans les montées et suis si concentré dans les descentes nids-de-poulesques que, la plupart du temps, j’en oublie de prendre des photos. C’est bien dommage, car cette route est d’une inimaginable beauté sauvage et luxuriante. « Un des plus fantastiques voyages en bus du monde. » Voici ce que le guide LP en dit !

 

13.12.2006 - Perdu dans l'immensité volcanique. Direction Ruteng. Flores.

 

Voulez-vous savoir ce que le guide dit à propos du vélo ?

« Faire du vélo sur la montagneuse Flores nécessite une endurance digne du Tour de France, ainsi qu’un décent VTT. »

Pour le VTT, j’ai ce qu’il faut. En ce qui concerne le Tour de France, je suis loin, très loin du compte…

 

Après sept heures et demie de route durant lesquelles je n’ai avalé que de l’eau, j’ai l’estomac dans les talons et suis mort de fatigue.

 

13.12.2006 - Après 7h et demie de route. Direction Ruteng. Flores.

 

Je fais une halte forcée à « seulement » cinq kilomètres de l’arrivée. Je vais me poser dans une gargote pour me reposer et me recharger en sucres et sels minéraux. Entre-temps, la pluie se met à tomber. Le temps d’engloutir ma portion de nouilles sautées et mon jus de fruit, l’orage tropical a cessé et je peux reprendre la route sous quelques dernières gouttes rebelles.

 

La dernière partie est, bien évidemment, une superbe ascension qui passe de 900m à 1’200m. Il me faut 1 heure pour arriver à bout de ces 5 derniers kilomètres.

 

J’arrive finalement à Ruteng après 67km et 9 heures de route, dont 7 heures et demie de vélo presque toutes en force !

 

Bienvenue au pays des volcans !!!

 

 

Jeudi 14 décembre 2006

 

Oui, la mauviette prend encore un jour de repos. Elle en a bien besoin.

 

La couverture n’était pas de trop, cette nuit. En effet, Ruteng s’élevant à 1'200m, les nuits sont plutôt fraîches. Quant à l’eau, elle est glaciale.  Pas d’eau chaude, par ici ! Pour un frileux comme moi, la douche « On the Rocks » fut un supplice.

 

 

Vendredi 15 décembre 2006

 

10km de grimpette pour se mettre en jambes à 5h et demie du matin ; ça vous dit ?

Et bien moi, je n’ai pas trop le choix. Je dois franchir cette bosse avant de redescendre vers le bord de mer.

 

Voilà, c’est escaladé ! Je n’ai maintenant plus qu’à me laisser pousser par la pente.

 

40km de descente (et quelques bosses) plus loin, j’arrive dans le village côtier de Mborong ; une paisible localité de quelques centaines d’habitants où l’on cultive le cacao et la noix de cajou, entre autres.

Je déniche un petit hôtel au centre où je suis accueilli de manière fort sympathique par le patriarche qui m’offre d’entrée une belle mangue en guise de bienvenue. Je n’ai pas encore vu la chambre, qu’il me demande de m’installer à sa table pour discuter le bout de gras. Mon indonésien progresse gentiment J.

 

Dans l’après-midi, je vais faire quelques courses à l’échoppe du coin. C’est là que je fais la connaissance de Kevin, le propriétaire du magasin. Il parle très bien l’anglais pour avoir passé plusieurs années à Sidney en tant qu’étudiant. J’ai beaucoup de plaisir à discuter avec lui de manière approfondie, car la plupart du temps, les conversations avec les personnes locales sont brèves et superficielles, à cause de la barrière du langage et des grandes différences culturelles.

 

Kevin me propose cordialement de me faire découvrir les alentours de Mborong sur sa moto.

Il m’emmène d’abord à Cepi Watu Beach ; une grande et belle plage de sable noir à 2km du bled.

 

15.12.2006 - Cepi Watu Beach. Mborong, Flores.

 

Les peuplades Manggarai vivent par ici dans des cabanes en feuilles de palmier dépourvues d’électricité et d’eau courante. Des enfants tentent de choper quelques poissons sur la plage.

 

15.12.2006 - Cepi Watu Beach. Mborong, Flores.

 

Kevin m’emmène ensuite faire le tour de ses diverses propriétés, dans les environs.

Il faut peut-être préciser que Kevin est un Indonésien d’origine chinoise (3e génération) et comme dans beaucoup de pays d’Asie, tels que la Thaïlande ou la Malaisie pour ne citer qu’eux, ce sont les Chinois qui tiennent les rennes de l’économie. Ces Chinois ont le business dans le sang. Ce sont des commerciaux nés. Les mots Investissement et Plus-value n’ont aucun secret pour eux. En outre, la communauté chinoise est très soudée – chacun s’entraide et se soutient – et se mélange (mariage) rarement à d’autres ethnies.

Kevin me dit que tous les magasins de Mborong lui appartiennent, ainsi qu’à sa famille (frère, oncle,..).

Nous nous rendons ensuite au port qui se trouve au pied du Mont Poncong Deki. Nous arrivons en plein coucher de soleil avec, au loin, une vue sur l’île de Sumba. Sublime !

 

15.12.2006 - Coucher de soleil depuis le port de Mborong. Flores.

 

Il y a de l’agitation sur ce petit quai retiré, car un bateau vient d’accoster pour y vendre le produit de sa pêche.

 

De retour au centre du village, Kevin m’invite chez lui boire le thé et en profite pour me montrer les nouveaux magasins qu’il va ouvrir prochainement sous son toit : un Warung plus un magasin/atelier Yamaha. Rien que ça !

 

 

Samedi 16 décembre 2006

 

Debout avant l’aube, en même temps que la prière coranique, je donne les premiers coups de pédale à 5h ½ tapantes. Pour ne pas faillir aux bonnes vieilles habitudes florésiennes, je me dandine en 1e dès la sortie du village.

 

16.12.2006 - Route en mauvais état. Direction Aimere. Flores.

 

Comme chaque jour, les accueillants autochtones sont là pour me souhaiter la bienvenue à leur manière : Hello Mister ! ; Hello Misses ! ; Good Morning ! (Quelle que soit l’heure de la journée J).

 

Un gaillard me dépasse à moto avec sa Jeanne se balançant en amazone au gré des bosses essayant de conserver l’équilibre instable de son volumineux bac en plastique. L’événement est si rare qu’elle a décidé d’annoncer ma venue à toute la montagne en criant de sa voix stridente « Hello Mister ! » tous les cent mètres, tout en continuant de me précéder à faible allure. Pour les gens d’ici, cette exclamation signifie « Venez vite ! Il y a un touriste qui débarque ».

Du coup, il y a foule au bord de la route. A certains endroits, il y a bien une 50e d’indigènes qui attendent mon arrivée, tous assis à l’asiatique.

 

Au fait, l’assise à l’asiatique, vous connaissez ? Il s’agit de se mettre accroupi sur ses pieds - les fesses ne touchant pas par terre - les coudes posés sur les genoux. De cette manière, vous êtes en position de repos en ne salissant que les pieds sans devoir être assis sur une chaise… qui n’existe pas, ici.

Essayez la position ! Vous constaterez que cela n'est pas si évident que ça, la première fois J.

 

L'assise à l'asiatique.

 

Je passe au travers de quelques territoires très reculés où certains enfants courent se réfugier chez eux en pleurant dès qu’ils m’aperçoivent.

J’ai souvent le sentiment d’être dans un autre temps.

 

Au fur et à mesure de mon avancée vers l’est, je remarque que les visages changent ; les ethnies malaises laissent gentiment place aux peuplades d’origine mélanésienne, avec leurs cheveux crépus, leurs grands yeux et leur peau couleur chocolat.

 

J’arrive à Aimere sans trop de difficultés, après quatre petites heures de route. Est-ce possible à Flores ??!!

C’est ici que je dois prendre le ferry, demain matin, pour Kupang ; île de Timor. Espérons qu’il n’y ait pas de changement d’horaire au dernier moment…

 

 

 

TIMOR OCCIDENTAL

Timor

 

Dimanche 17 – Lundi 18 décembre 2006

 

Je suis au port à 7h et le bateau est déjà là.

C’est le branle-bas de combat par ici ; les gens crient, les camions klaxonnent, les coqs chantent, les cochons hurlent, les chevaux hennissent, … La cohue se meut tous azimuts.

Avec l’aide de quelques locaux, je parviens à atteindre le guichet qui n’est autre qu’une minuscule salle avec une table et deux chaises, noyées dans un essaim de prétendants au voyage. Je joue donc un peu des coudes et m’arme de patience…

Une fois mon billet en main, je tente de me frayer un passage à travers tout ce remue-ménage dans ce capharnaüm.

Je réussi à embarquer, non sans peine, dans ce transporteur. J’installe ma bicyclette entre deux petits canassons et des sacs de gingembre.

 

Le bateau lève l’ancre vers 10h, après avoir été lourdement lesté de camions, animaux et autre nourriture en tous genres.

Durant cette longue et interminable croisière, j’ai tout le temps de sympathiser avec les autochtones, qui sont nombreux à venir me rendre visite et me nourrir de leurs délicieuses mangues.

Entre deux conversations, je m’étale de tout mon long sur les sacs de gingembre et pique un petit somme.

 

17.12.2006 - En attendant que le temps passe... Bateau direction Kupang.

 

Roupillon souvent perturbé par mon voisin de plancher qui n’est autre qu’un grand coq blanc s’égosillant à chanter plus fort que ses voisins. Cet infatigable gallinacé m’entonne à tue-tête son refrain toutes les cinq minutes. La Castafiore à côté, c’est de la berceuse. J’ai mesuré : 103 décibels à 2 mètres pour ce gaillard !!!

 

17.12.2006 - C'est  lui ! Sur le bateau, en direction de Kupang.

 

23 heures de bateau et 240 cocoricos plus tard – oui, monsieur s’est quand même assoupi de minuit à 3h du matin – je débarque enfin sur l’île de Timor.

 

Le port se situe à une 15e de kilomètres de la ville de Kupang. Me voici dégoulinant après cent mètres déjà, quand la première bosse m’annonce qu’ici non plus, ça n’est pas la Hollande. Un vrai Roller Coaster tropical, cette route !

 

18.12.2006 - Arrivée à Kupang, Timor occidental.

 

Le plan A était de traverser l’île pour rejoindre la ville de Dili, capitale du Timor oriental. Mais après m’être renseigné auprès le la population locale, j’ai changé d’avis.

En effet, plusieurs personnes m’ont déconseillé de m’y rendre à vélo en raison de troubles et tensions actuels dans la zone frontalière.

Depuis son indépendance de l’Indonésie, le 20 mai 2002, le Timor oriental a fait l’objet de nombreux conflits entre les milices pro-Jakarta et les indépendantistes et les casques bleus australiens ont bien du mal à gérer ces tensions.

 

Je choisi donc de sortir mon plan B : Kupang – Darwin en avion.

Par chance, le prochain avion part demain et il reste de la place.

 

Dans 24 heures, je change de continent.