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Journal 5 - du 31 mai au 16 juin 2006

Cambodge

Cambodge - 1'008km

Tracé rouge       = vélo

Tracé marron    = pick up 4x4

 

 

HELLO ! HELLO ! HELLO ! HELLO ! HELLO !  JJJ

 

 

Mercredi 31 mai 2006   

 

Il y a encore peu de temps (1 an), aucune route ne reliait Krong Koh Kong (KKK) au reste du Cambodge, le seul moyen étant le bateau pour Sihanoukville (Kompong Som).

Il est maintenant possible de quitter KKK par la « route ». Mais, connaissant l’état des « routes » au Cambodge - réputées parmi les plus mauvaises au monde - c’est avec un peu d’appréhension que je m’engage sur cette nationale 48, longue de quelque 150km, allant de KKK à Sre Ambel en traversant la chaîne de montagnes des Cardamones.

Et dès la sortie de KKK, le ton est donné ; l’asphalte laisse la place à une piste de terre ocre et j’attaque la première d’une interminable série de bosses de 100 à 300 mètres de dénivelé chacune.

 

31.05.2006. Sortie de Krong Koh Kong

 

Cette route est rythmée par 4 rivières qui la découpent et qui ne peuvent être traversées, jusqu’à présent, que par bateau (pont en construction).

 

J’arrive à la première rivière après 22km de piste en terre plus ou moins cabossée, alternée de gravier goudronné. Je demande combien je dois payer pour le bateau. On me dit : rien. Le bateau est gratuit pour les vélos.

 

La deuxième rivière est à 40km. Entre chaque rivière, mes seuls voisins sont les arbres de cette magnifique forêt pluviale, ainsi que quelques 4x4. Il n’y a que 4 villages sur 150km de piste, situés à chaque traversée de rivière.

 

10km de tôle ondulée auront eu raison de ma sacoche guidon. La fixation n’a pas tenu le coup et a cassé. Heureusement, il me reste assez de place dans mon gros sac étanche pour la mettre à l’abri.

 

Le temps se gâte. La pluie torrentielle transforme rapidement la piste en terrain de cross.

J’arrive sous la pluie, épuisé, affamé et assoiffé à la deuxième rivière. Je me dirige de suite vers la première cabane où l’on me fait des signes. Je laisse mon vélo sous la pluie et vais m’asseoir à l’abri, sur la seule chaise de la cabane. Je demande d’abord un endroit pour dormir. La famille qui m’accueille a l’air surprise. Je pense qu’elle s’attendait seulement à ce que je lui demande un coca… La mère me propose un sachet de nouilles chinoises. J’en avalerai 3.

 

En général, après une journée de route, à partir du moment où je descends du vélo, il me faut quelques minutes pour reprendre mes esprits et pouvoir dire quelque chose. La fatigue, la faim, la chaleur et la soif cumulées me mettent dans un état second.

 

Ce soir là, je suis dans un état second prononcé et m’endors presque sur ma chaise.

Finalement, le mari me propose de dormir chez eux cette nuit. Ce que je suis bien content d’accepter.

En discutant avec le mari, dans la soirée, j’apprends que je suis dans une station de police et que le village se trouve de l’autre côté de la rivière. Le mari est donc policier, ce qui ne l’empêche pas d’être de la plus grande gentillesse à mon égard. Il va me réparer la fixation de sacoche guidon et va aussi me préparer le repas du soir, bien arrosé… Il me prépare aussi mon lit : un oreiller. Et oui, je passe la nuit sur le plancher (comme lui) d’une cabane sans porte ni moustiquaire en pleine forêt subtropicale. Il fait 33 degrés avec une humidité dépassant 90% et je dors habillé de pantalons longs et manches longues, afin d’éviter un max les piqûres de moustiques…

 

 

Jeudi 1er juin 2006

 

Je suis au bord de la 2e rivière à 6h du matin et le gros bac dort encore. C’est donc avec une barque à rames que l’on vient me chercher. Quand je vois arriver cette espèce de pirogue qui doit faire 1m de large sur 3m de long avec une ligne de flottaison ne dépassant pas 20cm, j’ai peur pour mon vélo.

 

01.06.2006 - 2e rivière. Le vélo vient de passer à l'eau...

 

Je me dis : soit on chavire, soit on coule. C’est la première option qui s’est présentée peu avant d’accoster sur l’autre rive.

La stabilité est catastrophique. En me levant pour agripper le ponton, le bateau tangue et fait plonger mon vélo avec ses 60kg de bagages le guidon le premier dans l’eau. Le rameur le rattrape de justesse, avec grande peine, peu avant qu’il ne coule… Heureusement, mes sacoches étanches ont gardé mes affaires au sec.

Je m’apercevrai, toutefois, un peu plus tard, que mon compteur s’est décroché dans la bousculade et a dû finir de compter les kilomètres au fond de la rivière.

Quelle bonne idée ai-je eue d’emporter, dans mes bagages, un deuxième compteur de secours !

 

La route d’hier était en mauvais état. Celle d’aujourd’hui est impraticable ! Les fortes pluies de la veille ont transformé la piste en marre de boue, dans laquelle je m’enfonce jusqu’aux moyeux. Le prochain village est à 60km… J’abandonne après 2km et demande à un pick-up 4x4 de me prendre en charge. Un thaïlandais, ingénieur travaillant à la construction de cette route, accepte volontiers de m’emmener 90km plus loin, à Sre Ambel, jonction avec la route qui mène à Sihanoukville. C’est ici que je remonte sur ma bicyclette pour parcourir les 90km qu’il me reste avant d’arriver à Sihanoukville. Mon vélo ne se plaint pas de retrouver l’asphalte…

 

 

Vendredi 2 juin 2006

 

Pour un cyclo-voyageur, un jour sans rouler signifie souvent une journée passée à dormir, manger, dormir et manger. C’est ce que j’ai plaisir à faire aujourd’hui.

 

Sihanoukville est une sorte de Beach Resort au bord du Golfe de Thaïlande offrant d’interminables plages de sable blanc et fin.

Le quartier routard de Weather Station Hill, où je loge, est un endroit calme et relaxant où l’on ne voit pas le temps passer. Quelques bars à filles (1 à garçons) ont récemment fait leur apparition sur cette colline, ce qui engendre quelques nuisances sonores le soir venu.

Je fais la connaissance de Roy, un Québécois d’une soixantaine d’années qui habite ici depuis plus de 3 ans. Il m’indique les meilleurs endroits pour manger bon, pas cher et végétarien.

 

Samedi 3 juin 2006

 

Une longue journée s’annonce. 100km pour rejoindre la ville de Kampot.

Après avoir franchi les collines de Sihanoukville dans l’autre sens (la ville est en cul-de-sac), je rejoins la nationale 3. Pendant les 20 premiers kilomètres, la 3 est un vrai régal. La route est fraîchement asphaltée, avec une bande lente sur le côté et un trafic quasi inexistant. La route traverse moult petits villages de pêcheurs/agriculteurs. On fait sécher le riz au bord de la route. Les enfants me saluent les uns après les autres avec toujours de grands sourires et une dizaine de « Hello ! » chacun. J’essaie de répondre autant que possible avec un sourire, un geste de la main, un Hello. Les enfants sont un point marquant de mon voyage au Cambodge. Leurs sourires et leur joie de vivre illuminent ma route et me donnent de l’énergie. Même s’ils m’en prennent, de temps en temps, un peu…J Car, des fois, ils sont si nombreux que je ne sais plus où donner de la tête. Spécialement à proximité des écoles où ils sont toujours une trentaine le long de la route à me tendre la main et à me saluer chacun une dizaine de fois.

 

Les 30 derniers kilomètres sont en construction. La route est en terre ocre avec son cortège habituel de nids de poules, de poussière, de tôle ondulée et de plages de sable où mon vélo s’enlise.

 

03.06.2006 - 25km avant Kampot. Repos à l'ombre...

 

Il est midi et demi. Le soleil frappe violemment et le vent dans le dos amplifie la sensation de chaleur. Il fait un peu plus de 45 degrés au soleil. Mon corps à de la peine à maintenir sa température à 37 degrés et je dois m’arrêter dans une cabane pour me mettre à l’ombre un moment. J’esquisse un bref sourire à la propriétaire et file m’allonger, chez elle, sur le sol, sans même lui en demander l’autorisation, essayant de reprendre mes esprits. Je dégouline de transpiration. J’ai de la peine à faire descendre la température du corps. En voyant mon état, la propriétaire me propose de la glace, que je pose sans attendre sur la nuque et le front. 2-3 voisins curieux viennent voir ce qu’il se passe. Après 10 minutes, je refais surface. Je remercie la jeune femme, lui achète quelques boissons et me remets en selle pour les 12 derniers kilomètres.

J’arrive enfin à Kampot, sur les rotules.

 

Je crois que je ne vais pas rouler demain…

 

 

Dimanche 4 juin 2006

 

Je vous l’avais dit… Repos !  J

 

 

Lundi 5 juin 2006

 

Direction Takeo avec une ligne droite de 70km sur la nationale 3. La route est asphaltée et de qualité raisonnable. La chaleur est déjà écrasante à 7h du matin. Le simple fait de descendre mes affaires et mon vélo du 3e étage de l’hôtel provoque sur ma peau des ruissellements de la tête aux pieds. Il m’est arrivé de choisir une guesthouse plutôt qu’une autre parce qu’elle proposait une chambre au rez-de-chaussée…

 

Sur la route, je fais passer le temps en jouant avec les cyclistes cambodgiens qui sont assez nombreux. Je m’accroche à l’épaule de l’un, je discute avec l’autre. Certains s’amusent à me dépasser sur quelques dizaines de mètres. Tout ceci avec le sourire et dans la bonne humeur. Le peuple khmer est beaucoup plus extraverti que le peuple thaïlandais. Les hommes et les enfants n’hésitent pas à venir vers moi pour engager une conversation. Les femmes, quant à elles, se font, ma foi, un peu plus discrètesJ.

 

05.06.2006 - Village sur la route de Takeo. Je fais le plein d'eau.

 

Le soir, je suis donc assis à la table d’un stand de rue, en train de siroter mon jus de fruits, quand un jeune homme, arrivé de nulle part, s’assied à mes côtés et me demande ensuite la permission de s’asseoir. Je fais la connaissance de Nat, un cambodgien de 23 ans qui parle très bien le français. Il me raconte qu’il est orphelin et qu’il est parrainé par une famille française, ce qui lui permet d’être actuellement à l’université. Il propose de me présenter ses amis à l’endroit où il loge, qui n’est autre que le temple bouddhiste de Takeo. Là-bas, je me retrouve entouré d’une dizaine de personnes composées de moines et d’étudiants, curieux et heureux de pouvoir pratiquer leur anglais ou français. Après une heure de discussion qui a rapidement viré aux mœurs européennes…, Nat me conseille de rentrer, car le soleil se couche et des voyous (comme il dit) peuvent sévir le soir venu. Lui-même s’est déjà fait raquetter par des gangs de Takeo. Il n’en faut pas plus pour me décider à rentrer me coucher…

 

 

Mardi 6 juin 2006

 

Après quelque 75km d’une route asphaltée en assez bon état (mais, quand même, qu’est-ce qu’il y a comme poules qui font leurs nids sur ces routes cambodgiennes !!!), j’arrive à Phnom Penh, capitale du Cambodge.

 

06.06.2006 - Arrivée à Phnom Penh. Devant le Palais Royal.

 

Je ne reconnais plus la ville que j’avais quittée en 1999, lors d’un précédent voyage. Le trafic routier a explosé en 7 ans, saturant les boulevards et les rues, engendrant une pollution et une poussière difficilement supportables. Pour dire, je respire mieux à Bangkok. Et le gouvernement n’a rien trouvé de mieux à faire que de commencer à rétrécir (pour ne pas dire supprimer) les trottoirs prétextant que les cambodgiens n’aiment pas marcher…Ne serait-il pas mieux de commencer par créer des transports publics ? Phnom Penh, avec plus d’un million d’habitants, est dépourvue de transport public. Incroyable !!!

Un des maigres points positifs de cette explosion économique : la ville n’est plus aussi dangereuse qu’à l’époque et l’on peut maintenant se balader à pieds plus sûrement la nuit tombée.

 

 

Mercredi 7 juin 2006

 

Je profite de cette escale prolongée à Phnom Penh pour faire le plein stomacal de cette bonne vieille nourriture occidentale.

Vers 13h, je me rends au Walkabout ; un bar-restaurant ouvert 24h sur 24 qui attire une clientèle d’habitués expatriés. Comme dans la plupart des bars « branchés » de la capitale, des filles « légères » et légèrement vêtues (toutes freelance) ont toutes l’air d’être d’une très grande disponibilité… Je sens qu’elles m’ont vu arriver. Un jeune homme, grand, beau, athlétique et seul !? Serais-je la proie idéale ???  JJ Quoi qu’il en soit, ai-je à peine le temps de passer ma commande de spaghettis Napolitaine, qu’une jeune demoiselle vient à ma rencontre.

« Hello, can I seat here ? »

« Sure. No problem ! »

La voilà qui pose son verre à ma table et entame la discussion. Son anglais est des plus rudimentaires, mais il me laisse facilement comprendre son objectif à atteindre.

LA question arrive rapidement : « Do you want boom boom ? », ce qui, vous l’aurez compris, signifie « souhaites-tu avoir une relation sexuelle payante avec moi ? ».

Elle rajoute : « 10 dollars. We go upstairs. Have room. ».

Je lui réponds gentiment que je ne suis pas intéressé, mais elle insiste en prétextant qu’elle n’a pas assez d’argent pour payer ses études.

Alors, je dis « Ok ! Mais, c’est vraiment pour que tu puisses continuer d’aller à l’école ». J’aurai ainsi fait ma BA.

…A ce stade de la lecture, il me semble que certains viennent d’avaler de travers… Eh bien, que ceux-ci reprennent une déglutition normale, car il n’y a pas eu de OK. Et désolé pour tous ceux qui pensaient enfin arriver à un passage excitant du récit… Non, j’ai refusé ses moult avances, avec le sourire, mais d’un ton décidé. Il a fallu l’arrivée d’un fidèle client pour que Soph (c’est son nom) décide de changer de table.

Beaucoup de ces filles sont d’origine vietnamienne et la grande partie à moins de 18 ans…

 

 

Jeudi 8 juin 2006

 

C’est avec plaisir que je quitte cette capitale poussiéreuse, bruyante et polluée de monoxyde de carbone.

 

La nationale 6 jusqu’à Skuon est en parfait état. La route asphaltée est quasiment neuve.

A Skuon, je me rends dans l’unique guesthouse du village où la propriétaire me réclame 5 dollars pour un taudis. Pas de concurrence. Ils peuvent donc se permettre.

En déballant mes affaires, je constate que l’on m’a volé une enveloppe contenant 40 dollars dans la Royal Guesthouse de Phnom Penh (street 154). J’avais laissé traîné cette enveloppe sur le lit… C’est un peu de ma faute.

 

 

Vendredi 9 juin 2006

 

J’arrive frais comme un gardon à Kompong Cham, après seulement 47km très roulants sur la NH7.

 

Sur la route, je prends de temps en temps un malin plaisir à faire un petit jeu avec les jeunes cyclistes locaux. Je remarque d’abord dans mon rétroviseur que celui que je viens de dépasser tente de me rattraper. J’accélère donc la cadence aussi longtemps que mon poursuivant tient le rythme. Ce matin, un petit jeune s’est bien pris au jeu et m’a bien fait soufflé… Il a réussi à se mettre à ma hauteur pendant 2 secondes, le temps que je lui dise « Oh ! Good ! » en souriant. Il avait les joues écarlates et il n’a pas fallu longtemps avant qu’il ne soit plus qu’un petit point noir dans mon rétroviseur.

 

A Kompong Cham, je me dirige droit vers le Mekong Hotel, recommandé par le Lonely Planet. En arrivant à la réception, un blanc qui vient de faire le check out aperçoit mon vélo et me dit :

 

« Where are you from ? »

« I’m from Switzerland » je lui réponds.

« Do you speak French ? » me demande-t-il.

« Oui et vous ? Vous êtes français ? »

« Oui. Depuis combien de temps voyagez-vous à vélo ? »

« Depuis deux mois. »

« Et pour combien de temps ? »

« Oh, environ 3 ans… »

« Avez-vous lu des récits de voyageurs à vélo ? » ajoute-t-il.

« Oui, quelques uns. »

« Connaissez-vous celui du couple de français qui a eu un enfant en route ? »

« Et qui a voyagé durant 14 ans dans les années 70-80 ?!?! Oh oui que je connais cette histoire !!! » je lui réponds.

« Eh bien, c’est moi. Claude. » me dit-il !!!

« ???!!! C’est toi ???!!!

 

Je n’en reviens pas. Je lui demande au moins 3 fois si c’est bien lui. Je suis un peu sous le choc. C’est un des premiers livres de cyclo-voyageurs que j’aie lu. Dans le monde des cyclonautes, c’est un livre qui marque : 14 ans de voyage à vélo autour de la Terre, en couple d’abord, puis en famille après que Françoise ait accouché de Manon en Nouvelle-Zélande. La petite était dans une remorque, accrochée au vélo (si vous voulez en savoir plus, cliquez ici ).

 

Nous n’avons que 2-3 minutes pour discuter, car un taxi l’attend devant l’hôtel. Il m’explique brièvement qu'il fait maintenant des reportages et qu’il amène et distribue des vélos au Cambodge.

 

Une chaleureuse poignée de mains et l’on se dit au revoir !

 

Je monte mes sacoches dans ma chambre au 2e étage, alors que ma pensée est restée coincée au rez-de-chaussée, fixée à cette heureuse rencontre.

 

 

Samedi 10 juin 2006

 

Le tronçon de la NH7 qui va de Kompong Cham à Kratie vient d’être rénové. La route est à l’état de neuf. C’est le tronçon le plus roulant à ma connaissance. En plus, le trafic est faible. Quel plaisir !

 

10.06.2006 - Direction Memot. La route est à tout le monde...

 

Une trentaine de kilomètres avant Memot, la plaine du Mékong laisse place à une succession de belles bosses qui vont tout tenter pour m’épuiser (les coquines…).

J’arrive, en effet, épuisé dans cette grande ville poussiéreuse qu’est Memot avec 4h49 et 89km dans les jambes.

 

 

Dimanche 11 juin 2006

 

Cette petite étape de 47km, allant de Memot à Snuol, m’autorise un peu de souplesse au réveil. Je fais la grasse matinée et me lève à 5h30 avec le soleil, au lieu des 5h habituelles.

La chaleur et l’humidité en cette période sont telles que je suis liquéfié avant même d’être monté sur le vélo. Même si je m’habitue à cet état de moiteur extrême, je dois faire attention à constamment m’hydrater, car je dégouline, littéralement, du matin au soir. Je bois environ 1 litre d’eau par heure (oui, Léandre, avec un Diet Coke de temps en temps après l’effortJ).

 

Ce matin, dès les premiers coups de pédales, j’ai l’impression d’avoir un pneu dégonflé, car j’avance avec peine. Je m’arrête après 3km et contrôle la pression des pneus avec les doigts. La pression est bonne. Bizarre… Je m’essouffle à 15km/h, alors que, normalement, sur le plat, je suis à l’aise à 18km/h. Ca n’est qu’après 5km, en regardant derrière moi, que je constate que la route n’a cessé de monter… Ca n’est pas la première fois que cette sensation  de pneu dégonflé me piège. Avec 50kg de bagages, le moindre faux plat me ralentit comme un coup de frein.

 

Tout le parcours est vallonné et traverse des plantations d’hévéas. J’ai quasiment la route pour moi tout seul. Ce qui ne m’empêche pas de maudire ces satanées bosses qui n’en finissent pas.

 

 

Lundi 12 juin 2006

 

Une autoroute pour moi tout seul ! Le tronçon NH7 qui relie Snuol à Kratie est un boulevard à l’état de neuf. Le trafic quasi inexistant me permet de m’arrêter au milieu de la route quand bon me semble.

 

12.06.2006 - Seul au monde...

 

Ce parcours traverse quelques villages très reculés où les seuls moyens de transport sont le char à boeuf et la marche à pieds. Toute activité est interrompue pour regarder passer le phénomène que je suis. Les paysans ont les yeux écarquillés en me voyant pédaler et certains enfants courent se réfugier chez eux dès qu’ils m’aperçoivent. Ils n’ont vraisemblablement pas l’habitude de voir un blanc de si près et sur une telle monture.

 

Kratie est une charmante ville à l’architecture coloniale française bien préservée, située au bord du majestueux fleuve Mékong. Un coucher de soleil à ne pas manquer !

 

12.06.2006 - Kratie. Un crépuscule au bord du Mékong.

 

 

Mardi 13 juin 2006

 

Je reste une nuit supplémentaire à Kratie pour recharger les batteries au max. Je vais en avoir grandement besoin demain…

 

 

Mercredi 14 juin 2006

 

Réveil à 4h30. Une longue journée m’attend. Je dois rejoindre la ville de Stung Treng qui est à 145km au nord de Kratie. Je donne les premiers coups de pédales à 5h30 du matin. Je donnerai les derniers à 15h… 9 heures et demi sur la route avec 30 minutes de pause à mi-chemin, le temps d’avaler une soupe de riz et légumes.

 

Cette étape fut un interminable cauchemar. 145km de terre poussiéreuse et sablonneuse alternée de gros gravier. Le tout sous un soleil de plomb. Le fort taux d’humidité et l’absence quasi-totale d’ombre n’ont pas facilité les choses non plus.

La quasi-totalité du parcours traverse des zones sauvages inhabitées. Pas âme qui vive (si, un tigre et un ours, rien de plus…J).

 

14.06.2006 - Après une centaine de kilomètres...

 

J’arrive à Stung Treng exténué, dans un état d’épuisement avancé. Dès l’entrée de la ville, je laisse mon vélo sur la route et vais m’asseoir par terre, à l’ombre d’une maison, tentant de reprendre mes esprits. Il me faudra attendre 30 minutes sans bouger avant que mon rythme cardiaque ne baisse la cadence et que la température de mon corps ne diminue.

Je me rends ensuite à la guesthouse qui n’est que 100 mètres plus loin. En voyant le personnel et les backpackers assis à leur table, frais comme de l’eau de source, je me sens tout à coup un peu sale. On ne distingue plus la couleur de ma peau qui est dissimulée sous une couche de poussière ocre.

 

Enfin ! Je suis arrivé !

 

Cette étape aura mis à rude épreuve mon physique, mon mental, mon vélo ainsi que mon matériel. Le tout à dû prendre quelques rides dans la journée…

 

 

Jeudi 15 juin 2006

 

Dormir, manger, dormir, manger, dormir,…Voilà souvent le programme d’un cyclo-voyageur quand il ne pédale pas…

 

Demain, je passe la frontière laotienne.

 

 

Vendredi 16 juin 2006

 

La route qui mène à la frontière laotienne est, elle aussi, en rénovation et je n’aurai droit qu’à de la terre poussiéreuse et du gros gravier jusqu’à la douane.

 

J’arrive au poste frontière cambodgien de Dom Kralor après 60km. Le guide de voyage Lonely Planet averti qu’une somme aléatoire non officielle entre 2 et 5 dollars est extorquée à cette douane, du côté cambodgien comme du côté laotien. Etonnamment, l’officier khmer ne me réclame pas un centime et me rend mon passeport avec son tampon de sortie. Est-ce parce que j’ai sympathisé d’entrée avec lui en lui parlant de la coupe du monde de football et de l’excellent score de la Suisse contre la France (0-0) ?? Peut-être. Ou est-ce mon visage d’ange qui l’a attendri ?? Qui sait ?J Car, je discutais hier encore avec plusieurs voyageurs qui ont tous confirmé avoir dû payer entre 1 et 2 dollars. Soit. Je me remets en selle pour rejoindre le poste laotien qui se trouve à une centaine de mètres au nord, en pleine forêt. Un minibus de touristes vient d’arriver et il y a foule autour de la hutte. Je pose mon vélo et m’assieds tranquillement sur les marches de la cabane en attendant que ce monde retourne dans le minibus. J’entends un japonais qui se fâche quand l’officier lui réclame 2 dollars. Le nippon le menace de contacter son ambassade et lui demande son nom. « No problem ! » lui répond l’officier… Ca n’a pas l’air de l’inquiéter. Ca ne doit pas être la première fois qu’on le menace.

Entre-temps, un autre japonais qui vient de payer son dû m’aperçoit et sans même m’adresser la parole, sort de suite son appareil numérique et me prend en photo, ainsi que mon vélo, parqué un peu plus loin. Il retourne ensuite s’installer dans le minibus. J’ai un peu ressenti ce que doivent ressentir les autochtones quand nous les prenons en photo sans même leur adresse la parole. Ca ne m’a pas fâché. Ca m’a même fait sourire. Mais, c’est un sentiment assez bizarre.

Une fois toute cette équipe loin, je me rends à mon tour devant l’officier laotien pour faire tamponner l’entrée au pays dans mon passeport. Le jeune homme me réclame sans gêne 2 dollars, que je lui donne sans rechigner et lui demande de me prendre en photo devant la cabane. Il s’exécute sans rechigner…

 

16.06.2006 - Douane laotienne de Dong Kalaw

 

Les 5 premiers kilomètres après le poste laotien sont un vrai champ de bataille. La piste, qui se trouve en pleine forêt, est complètement défoncée. Pire que ce que j’ai connu au Cambodge. Cratères, rochers et sable m’obligent à avancer au pas.

Je rejoins enfin la nationale 13 que je devrais suivre jusqu’à Vientiane, capitale du Laos.

Cette route est en parfait état et très peu fréquentée dans cette région.

 

Je passe la nuit sur Khong Island, île très calme située au milieu du fleuve Mékong.